Petite méditation sur Hanouka et la Nativité
Sandrine Caneri
Cette année à cause de l’occurrence
des deux fêtes liturgiques, Noël et Hanouka, permettez moi de vous livrer une
petite méditation. Il est d’usage dans le judaïsme d’affirmer que la fête de
Hanouka n’a strictement aucun rapport avec Noël et qu’il n’y a aucune
comparaison à envisager. Du point de vue du contenu, comme de celui de la
signification de cette fête, cela est absolument exact. Car la naissance de
Celui qui est le Verbe de Dieu, reconnu comme Christ par les chrétiens, est
totalement hors du champ religieux de la tradition juive et marque précisément
la spécificité et la nouveauté du christianisme. Cependant, une fois que nous
avons pris la mesure de cette distance absolue, pouvons-nous découvrir
néanmoins un contact aussi minime soit-il entre ces deux fêtes ? Nous
verrons que curieusement chacune d’entre elles porte un deuxième nom et qu’il
est commun. Mais pour le moment constatons cette année une occurrence du
calendrier[1].
Hanouka, fêté
le 25 de Kislev, et la Nativité ne tombent exactement en même temps que
rarement. Elle est fêtée cette année 2016 par nos frères juifs du 25 décembre
au 1er janvier. Elle comporte plusieurs aspects, mais pour faire
bref, elle célèbre la victoire des Maccabées sur le paganisme des Grecs qui
avaient profané et souillé le Temple de l’Eternel dans le but d’anéantir tout
monothéisme. La purification du Temple est rendu possible par le miracle de la
fiole d’huile retrouvée sous les décombres et dont la faible quantité ne
permettait d’allumer la flamme qu’une seule journée. Or elle a pourtant brûlé
durant huit jours.
Le Chandelier du Temple - la ménorah
- avait sept branches, sept lumières. Sept est le chiffre qui symbolise le
monde crée, le monde d’ici bas, rappelant les jours de la Création. Le Temple
étant une image terrestre du Temple céleste.
La Hanoukia,
qui est utilisée pour la fête de Hanouka, contient huit branches, huit lumières[2]
et chaque jour, une lumière supplémentaire est allumée. Or avec le chiffre huit
nous sortons du temps et du monde créé pour basculer dans le monde incréé, le
monde messianique, le monde à venir. Il y a dans la fête de Hanouka par le
chiffre huit, une tension vers le monde messianique, nous dirions vers
l’eschaton.
Or les rabbins disent que les huit
branches du Chandelier de Hanouka, procèdent des huit guides d’Israël
dont parle le prophète Michée : Jessé, Samuel, Saul, Elie, Sophonie, Amos,
Sédécias et ... le Messie.
Si le dernier jour de la Création
est un shabbat, alors le premier est un dimanche, « jour un »[3], unique,
à l’image du Dieu Un. Or ce jour là, est le jour où Dieu créé la Lumière. Et
les Sages d’Israël disent que cette Lumière du premier jour est la lumière
messianique et qu’elle est dissimulée pour être mise en réserve pour les justes
dans le monde à venir[4].
Hanouka est également appelée « la fête
des Lumières ». Cette année la fête s’étend de la Nativité du Christ à sa
circoncision, dont on sait qu’elle doit être effectuée le huitième jour
précisément pour que le garçon qui entre dans l’alliance (nom hébreu de la
circoncision : brit milah) entre dans le monde
par un rite messianique qui le situe en homme du huitième jour, en homme du
monde à venir.
Un dernier mot :
nous savons que la Nativité était célébrée à l’origine de l’Église dans la même
fête que la Théophanie, le 6 Janvier. Plus tard seulement elle fut célébrée
indépendamment le 25 décembre. Or, la Théophanie est également appelée « la
fête des Lumières »[5] car nous sommes invités à
entrer dans la Lumière de la Sainte Trinité, dont l’Évangile relate lors du
Baptême du Christ la première manifestation : Lumière est le Père, Lumière
le Fils, Lumière le Saint Esprit. « C’est en effet dans la lumière
resplendissante de l’humanité divinisée du Christ que nous sommes initiés à la
Lumière de la Sainte Trinité »[6].
Il est presque troublant que ces
deux fêtes portent comme deuxième nom : « La fête des Lumières ».
La coutume en
occident d’allumer une bougie supplémentaire lors des quatre dimanches de
l’Avent provient-elle du même esprit ?
* * *
*
Midrash Yalqout Shimoni sur Is 60,1 ( XIème
siècle)
"Et Dieu vit
que la lumière était bonne" Ces mots nous apprennent que le Saint Béni
soit-il, a prévu les jours et les actes du Messie, dès avant de créer le monde
; et il cacha le Messie et ses jours sous son trône de Gloire. Et Satan dit
devant la face du Saint Béni soit-il : « Roi du monde, la lumière cachée
sous ton trône de gloire, pour qui est-elle ? Et Dieu répondit : pour celui qui
est destiné à te faire t'en retourner la honte au visage ».
Armand Abécassis
« Enfin, alors que le candélabre du Temple n’avait que sept branches,
le petit candélabre familial en possède huit : c’est dire la décision
rabbinique d’imprimer, dans la fête de Hanoukka, la dynamique messianique que
traduit le passage du chiffre sept au chiffre huit. En cohérence avec le
premier chapitre de la Torah, qui fait du septième jour l’ère de l’humanité,
chargée pour sa part d’y ajouter le huitième jour des temps messianiques, suite
espérée des temps historiques ».
Texte paru dans l’édition papier du journal La Croix
du 19-20 décembre 2009
Colette
Kessler
– Méditation sur Hanouka 2005 – qui tombait cette année là du 26/12 au 2/01.
Cette
petite fête dure huit jours ; c'est là une durée messianique.
Le Ness (miracle) nous ouvre à l'espérance des temps du Messie à venir. Hanouka
est d'ailleurs appelée au Second Livre des Maccabées : "la fête de
Souccoth de l'hiver" (2 Macc. X, 6), Or, la fête de Souccoth est
(selon le Talmud Sukka. 5, 6 ; 55 b) célébrée par Israël et pour "les
soixante-dix nations de la terre". C'est la fête où, par excellence,
Israël exprime sa vocation universelle à travers sa singularité même.
D'ailleurs, "ces lumières de Hanouka que nous allumons chaque année non
pour nous en servir mais pour les
contempler, pour rendre grâce à Ton Nom, ô Seigneur..." (texte lu après
l'allumage), nous les allumons aussi pour nous souvenir de la Lumière de la Création , la lumière
primordiale (Gn 1,3), produite par la première Parole créatrice de Dieu,
lumière inaccessible aux hommes dans un monde encore non rédimé, "cachée
et mise en réserve pour les justes des temps à venir, des temps ultimes"
(T.B. Hag 12 a ),
mais dont par la
Révélation Dieu nous a fait entrevoir l'éclat, comme il est
dit au Livre des Proverbes (VI, 23) :
"Car
la Mitsva – le précepte- est lampe et la Tora Lumière"
On peut aller voir encore les articles : http://www.massorti.com/Significations-de-Hanoucca
particulièrement celui du Rabbin Rivon Krygier : Hanoucca et Noël.
On peut aller voir encore les articles : http://www.massorti.com/Significations-de-Hanoucca
particulièrement celui du Rabbin Rivon Krygier : Hanoucca et Noël.
[1] Notons que liturgiquement le
jour commence toujours la veille, tant chez les juifs que dans la tradition
byzantine.
[2] Il y a
une neuvième lumière soit sur le côté, soit en avant, qui est le shamash,
c'est-à-dire qui sert à allumer les autres, mais ne compte pas dans les huit.
Car comme ces huit lumières sont saintes, elles ne doivent pas « être utilisées
» ni pour allumer autre chose, ni pour s’éclairer. C’est pourquoi il fallait
ajouter une 9ème qui puisse servir à l’allumage.
[3] Tant
dans le texte hébreu que dans le texte grec de la Septante. Notons que
liturgiquement le jour commence toujours la veille, tant chez les juifs que
dans la tradition byzantine.
[4] Midrash
Rabba Genèse 3,6.
[5] voir le Synaxaire 1988 p.339
[6] Ibidem